Du 6 janvier au dimanche de carnaval
C’est au soir du 6 janvier, à la fin des fêtes de Noël que carnaval commence. Des jeunes gens s’en vont faire le tour de toute la commune, juchés sur une camionnette en agitant des cloches de vaches durant toute la soirée. On dit que carnaval est alors « réveillé ». Les festivités peuvent débuter.
Quelques temps plus tard, les premiers personnages du carnaval entrent en scène. Dans un vacarme assourdissant, les Peluches envahissent le village et en deviennent les maîtres. Gare à ceux qui se trouveront sur leur passage.
Elles sont habillées d’un costume composé de peaux de chamois, mouton, cerf et bouc non tannés, portent un masque sculpté dans du bois d’arole qui représente en principe un animal et secouent une cloche de vache appelée « sonnette ».
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Tantôt rustres, tantôts câlines, parfois facétieuses mais toujours sauvages, elles déambulent dans les ruelles du village, monopolisent la place dans les cafés et ne laissent pas en paix les braves gens tant que ceux-ci ne leur ont pas offert un verre ou deux.
Le temps du carnaval, le village leur appartient. Leur forte odeur, le vacarme qu’elles produisent et leur attirance pour les jeunes filles imprudentes ne laissent personne indifférent !
Tous les week-ends précédant carnaval puis tous les jours gras, elles recommencent leurs allées et venues. Elles utilisent les forces de la nature afin de chasser tous les mauvais esprits de l’hiver ; ceux-là même qui sont responsables des avalanches, des maladies, du manque de nourriture et qui empêchent le printemps d’arriver.
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Le dernier samedi de la période de carnaval, de vieilles femmes un peu enrobées et portant le costume traditionnel d’Evolène s’en vont faire le tour de toute la commune : Les Maries. En fait, ces hommes travestis reproduisent les faits et gestes d’une prénommée Marie, née en 1913, qui habitait aux Haudères. Elles prodiguent de « bons conseils » aux gens qu’elles croisent et n’hésitent pas à donner leur point de vue parfois surprenant sur l’actualité régionale et internationale.
Au petit matin du dimanche de carnaval, une bande motivée se retrouve pour donner vie aux Empaillés. Ces monstres sont habillés de sacs de jute, remplis de plus de 30 kilos de paille. Ils ne sortent que ce jour-là. Ils portent un masque sculpté dans du bois arolle et un balais de riz qu’ils utilisent non pas pour nettoyer quoi que ce soit mais pour salir les passants en le trempant dans les flaques.
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A la sortie de la messe, ils s’en vont déambuler sur la rue principale en compagnie des Peluches.
Ils représentent l’esprit des ancêtres, des morts qui hantent la région depuis toujours. Contrairement aux Peluches, les Empaillés ne cherchent pas à les chasser mais essaient plutôt de leur ressembler afin de les amadouer et les rendre plus cléments.
Peluches, Empaillés ainsi que toutes sortes d’autres masques se retrouvent le dimanche pour partager le repas de midi avant de reprendre leurs déambulations jusqu’à la tombée de la nuit.
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.Lundi de carnaval et Mardi gras, mise en scène de la « Poutratze »
Un des empaillés* n’est toujours pas rentré ! C’est la Poutratze, le bonhomme hiver du carnaval d’Evolène.
Son histoire est mise en scène dans les rues du village le lundi et le Mardi gras.
Le lundi soir, la troupe d’élite du carnaval, composée de militaires à la retraite depuis un certain temps, est chargée de le retrouver et d’arrêter le fugitif.
Ces joyeux lurons s’en vont donc fouiller le village à la recherche de la Poutratze. Ils se découragent assez vite et préfèrent nettement passer de bons moments dans les bistrots à discuter du bon vieux temps autour d’un verre que de braver le froid à l’extérieur !
Les enfants du village eux sont en général plus motivés. Ils cherchent et finissent par retrouver l’empaillé égaré.
La troupe d’élite n’a alors plus qu’à lui mettre les chaînes et à l’emmener.
Une fois la Poutratze arrêtée, elle va être jugée. Le Mardi gras, en soirée, elle est amenée à travers le village par les peluches, les habitants en colère, épuisés par cette longue période de désordre et la troupe d’élite du carnaval.
Le jugement est rapide et la condamnation terrible. La Poutratze va être mise à mort sur le bûcher. Le testament de Gustave Chevignoule, texte rédigé à moitié en français et à moité en patois est lu à l’assemblée avant que le bourreau ne boute le feu au bonhomme hiver.
La population ne fait pas trop de sentiments. Pourquoi s’apitoyer sur le sort de ce monstre, responsable du désordre qui dure depuis plus d’un mois à Evolène alors qu’il ne reste plus que quelques heures avant le carême !
D’ailleurs, c’est à minuit exactement que le carnaval se clôture par un grand moment d’émotion. Au pied du clocher de l’église, dans un vacarme assourdissant, toutes les peluches* enlèvent leur masque et révèlent leur identité.